Livre des Proverbes 8,22-31.
Psaume 8,4-5.6-7.8-9.
Romains 5,1-5.
Jean 16,12-15.
***
Nous pouvons savourer cette
méditation ou mieux cette contemplation de l’auteur du livre des Proverbes sur
la Sagesse de Dieu, une sagesse qui est personnifiée.
Dans cette contemplation, la
sagesse se qualifie elle-même, de « première des œuvres divines »,
première depuis toujours, « principe de son action et témoin de son action ».
Mais aussi, elle se présente
comme un enfant, grandissant et observant l’action divine.
En fait, elle se décrit comme
font les enfants, à côté de leur père ou de leur mère en action, et participant
à l’action mentalement et même corporellement, imitant les gestes qu’il voit
faire, ce qui a pour conséquence de réjouir les parents et les faire fondre de
tendresse.
La Sagesse dit également
« trouvant mes délices avec les fils des hommes » c.-à-d., aimant la
compagnie des enfants des hommes. En fait, là aussi, elle se décrit comme une
camarade des enfants des hommes, comme
des camarades de jeux dont la compagnie est délicieuse. Quel bonheur !
Je ne sais pas si vous avez
eu, dans votre enfance, des camarades, dont la compagnie était
délicieuse ! En tout cas, cela fait envie, et c’est une belle image de
bonheur. Heureux êtes-vous, si c’est toujours le cas, avoir des connaissances
dont la présence est délicieuse.
Quand l’AT invoque la
« Sagesse de Dieu », ne réduisons pas tout de suite la Sagesse divine
à l’Esprit ou au Christ.
N’aplatissons pas trop vite le
texte en du déjà connu. Conservons-le comme il nous a été donné.
Conservons l’expression
« Sagesse divine », car c’est ainsi que cette réalité divine est
désignée dans l’AT. On voit bien qu’elle tient à la fois de l’Esprit et du
Christ, tel que le secret nous a été révélé dans le NT. On retrouve des traits
de l’un et de l’autre dans ceux de la Sagesse de Dieu.
Quand on se plonge dans
l’histoire des sociétés humaines sur la planète et à travers l’histoire, quand
on prend lecture de leurs écrits sapientiaux, de leurs textes de sagesse, alors
ces écrits ou ces dits, nous parlent immédiatement, ils nous atteignent sans
besoin d’interprétation.
On y trouve du goût, et
parfois même, on les trouve délicieux, raffinés. Ils nous parlent sans détour.
Ils sont toujours positifs,
éducatifs, orientés vers le bien de l’humanité.
L’exégète Paul Beauchamp
aimait à dire que la sagesse est ce que les nations ont en commun. Ce qu’elles
ont en commun : l’humanité en somme ; le cœur de l’humanité, c’est là
que la Sagesse de Dieu y trouve ses délices.
C’est là aussi que nous
sommes convoqués pour connaitre, apprécier et nous réjouir de la sagesse divine
sous toutes les latitudes, dans toutes les cultures ; en somme, partout où
il y a des êtres humains.
Nous expérimentons dans la
sagesse des nations une saveur, une spontanéité, une immédiateté. Or, quand il
s’agit de parler de la Sagesse de Dieu, cette fraîcheur est parfois contrariée
par de la mauvaise théologie, en particulier la théologie de la transaction.
Cette fraicheur peut être
aussi contrariée par les superstructures que l’on a rajoutées à la parole de
Dieu ou point de l’enfouir sous des couches épaisses d’observance comme cela
s’était produit chez les Hébreux.
On pourrait aussi trouver ces
superstructures chez nous également si l’on se donnait la peine de regarder les
choses en face.
Paul, dans la deuxième lecture,
rétablit à sa manière, la spontanéité, la fluidité, la frugalité de la parole
de Dieu en rappelant justement la primauté de la grâce, car il n’y a pas de
transaction chez Dieu et point n’est besoin de ces superstructures qui
finissent par se substituer à la parole de Dieu.
Paul maximalise la chose en disant que même dans la détresse nous mettons notre fierté ! Même dans la détresse, car en bout de chaine, cette détresse produit l’espérance, et l’espérance n’est autre que le signe de l’Esprit dans notre cœur.
Paul maximalise la chose en disant que même dans la détresse nous mettons notre fierté ! Même dans la détresse, car en bout de chaine, cette détresse produit l’espérance, et l’espérance n’est autre que le signe de l’Esprit dans notre cœur.
Et si c’est l’Esprit qui est
dans notre cœur, alors nous sommes dans le vrai.
Voilà donc ce qui est promis
aux disciples : l’Esprit de vérité.
On voit par la même occasion
que le projet de Dieu n’a pas changé depuis le commencement, car il s’agit
toujours que la Sagesse de Dieu trouve ses délices dans la compagnie des
enfants des hommes.
À la différence près que la
révélation du secret de Dieu, c.-à-d. ce que l’on désignait avant par la
Sagesse de Dieu et qui se rend présent maintenant ou se manifeste par le Christ
et l’Esprit.
La proximité de la fête de Pentecôte
nous rappelle le lien entre le Christ et l’Esprit et leur différence, et, une
fois la révélation faite, en quelque sorte, nous revenons, différemment cette
fois, sous la mouvance de la Sagesse de Dieu.
Le temps de l’Église, c’est le Temps de la Sagesse de
Dieu tel que l’évangéliste Jean essaie de nous le traduire dans la dialectique
qui lui est reconnaissable.
Quand l’Esprit vient habiter notre cœur, c’est le cœur
de Dieu qu’il fait habiter en nous, rien moins que cela ! C’est la Sainte
Trinité qui se donne rendez-vous chez nous, car notre demeure fait ses délices.
Observons que dans cette
relation qui met en scène le Père de miséricorde, le Christ Seigneur et
l’Esprit de vérité, on retrouve là les caractéristiques de la périchorèse, ou
la dépossession de l’un envers l’autre, de l’un pour l’autre.
Rien n’appartient au Père
sinon au Fils, et rien n’appartient au Fils sinon au Père ; et c’est
l’Esprit qui nous fait sentir cette mutuelle dépossession qui crée un mouvement
de relation, une sorte de « Danse » à la Henri Matisse, cette ronde ocre
sur fond bleu et vert qui suggère la joie de vivre.
La contemplation de l’auteur
du texte tiré du livre des Proverbes nous rappelle l’importance de faire de la
théologie à partir de l’expérience existentielle que nous avons de Dieu comme
Père de miséricorde, Christ Seigneur et Esprit de vérité, pour que cette
théologie soit authentique. En effet, nous faisons de la théologie dès que nous
essayons de penser la foi, un peu comme monsieur Jourdain parlait en prose sans
le savoir.
Ainsi, quand nous essayons de
penser la Trinité, ou quand nous essayons de l’expliquer à d’autres gens, nous
devons partir de l’expérience que nous avons de Dieu. La Trinité n’est pas un
concept ; elle ne s’éprouve que dans l’expérience de la rencontre de Dieu,
et c’est par grâce, nous dit le philosophe Martin Buber, c’est par grâce que la
rencontre a lieu.
Prions le Seigneur pour que
la Sagesse de Dieu, quand elle se manifeste à nous, fasse notre délice et contribue ainsi à notre
conversion afin que les derniers recoins de notre personnalité se tournent vers
Dieu en toute confiance, sans rien garder pour nous même, dans l’esprit de la
dépossession mutuelle qui caractérise la Trinité Sainte.
Amen
Père Roland Cazalis
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