Livre de l'Ecclésiaste 1,2.2,21-23.
Psaume 95(94),1-2.6-7.8-9.
Lettre de saint Paul Apôtre aux Colossiens 3,1-5.9-11.
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 12,13-21.
***

Néanmoins, cette logique n’est pas
universellement acceptée. On entend aussi et surtout le talent reçu comme
l’opportunité de s’enrichir, d’accumuler, de bâtir un empire, de devenir un
magnat, etc. Vanité, dit le Qohèleth ?
On sent bien dans ce dilemme qu’il
s’y joue quelque chose d’essentiel dans l’existence humaine, et qu’on est sur
une ligne de crête.
Les bons sentiments ne suffisent
pas pour durer dans l’altruisme, surtout si l’on n’est engagé qu’en son
nom propre. Auquel cas, il apparaîtra
assez vite que notre contribution ressemble fort à une goute d’eau dans la mer.
Dans la parabole des talents, on
peut remplacer le mot « talent » par « désir », d’où
l’industrie qu’il engendre dans le monde. Mais où le désir me mène-t-il ?
Nous fêtons aujourd’hui Ignace de
Loyola, le fondateur de l’ordre des jésuites pour utiliser une expression
connue. Probablement, cet homme a apporté quelques éléments de réponse à notre question.
Quand on est ingénieur,
scientifique ou artisan, on sait que la réalisation d’une œuvre requiert de la
méthode, faute de quoi l’œuvre risque de ne pas être utilisable. Si la
réalisation d’une œuvre matérielle requiert de la méthode, alors dans les
choses spirituelles, il faut redoubler de méthode, car le risque de se
fourvoyer est encore plus grand.
Comment être sûr de faire le bon
choix ? Ce qu’apporte Ignace de Loyola est le fait de mettre ensemble le
désir et la méthode, ou plus simplement de proposer une école du désir déployée
dans un petit manuel appelé « Exercices spirituels ».
Les êtres de désirs qui ont une
affinité avec ce genre de méthodologie verront que le sujet est invité à
revenir au fondement de son être pour retrouver la source, cette énergie en
forme de promesse qui lui permet de projeter son existence comme une force qui
va.
Le chemin qui se présente dès lors
devant lui n’est pas tout tracé. Il se trouve ou plutôt se fait tout en
avançant avec des passages par de subtils postes d’aiguillage à négocier
intérieurement.
Dans cette dynamique, l’existence
du sujet, autrement dit sa vocation, apparaît tel un aimant, avec la promesse
en guise de pôle Sud et la mission en guise de pôle Nord, c.-à-d. la
médiation par laquelle la promesse
s’accomplit en sollicitant toute sa personne, son énergie, son intelligence et
son affectivité, mais tout cela sur un fond de vacances. En effet, qui dit
promesse, dit grâce ; la réalisation de la promesse est encore
l’expression de la grâce initiale.
Celui qui a le désir perverti,
comme ont dit trivialement, c.-à-d. celui qui a décidé de toute façon de
s’enrichir en vue de lui-même n’entrera pas dans cette dynamique qui semble
être faite pour le détourner de lui-même.
Celui qui, en replongeant dans le
fondement de son existence, découvre la subtilité et le ressort de la vie
croyante, n’envisagera pas d’autre voie que ce sport de haut niveau qu’est
l’école du désir.
Dans cette optique, s’enrichir en
vue de Dieu n’est autre qu’entrer dans la participation à la vie qu’est Dieu.
En effet, emprunter le torrent de la promesse comme la voie navigable qui me
convient revient à entrer dans la vie avec Dieu, par Dieu et vers Dieu.
C’est seulement depuis cette
manière d’exister que l’on peut savoir avec justesse et donc avec justice ce
que l’on doit faire de sa récolte, de son grenier et de son héritage.
On voit bien qu’il y a une
concomitance entre connaître Dieu et emprunter la voie du désir ou toute autre
voie qui mène à la participation. Par les temps troublés que nous vivons,
certains évoquent le nom de Dieu pour mal faire afin de faire mal. Cette
infamie montre à l’évidence qu’il y a une différence abyssale entre connaître
les textes sacrés et connaître Dieu.
Prions le Seigneur afin que les
hommes et les femmes de désir se décident pour l’aventure de la participation.
Amen.
Père Roland Cazalis
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