Deuxième livre des Maccabées 7,1-2.9-14.
Psaume 17(16),1ab.3ab.5-6.8.15.
Deuxième lettre de saint Paul Apôtre aux Thessaloniciens 2,16-17.3,1-5.
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 20,27-38.
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La proximité de la
commémoration des défunts mercredi dernier donne aux textes du jour une
actualité particulière.
Il est question d’un grand
mystère de la vie humaine, selon la tradition abrahamique, à savoir la
résurrection. Ce n’est pas seulement une vie après la vie qui pourrait
poursuivre la première sous une autre forme, il s’agit bien d’autre chose.
Il s’agit de la résurrection,
et même plus, de la résurrection avec le Christ.
Voilà un thème difficile s’il
en est puisqu’il s’agit d’un mystère, c.-à-d. une réalité dont nous n’avons pas
encore l’expérience, mais c’est aussi un fondement de notre foi, et un sujet que nous ne pouvons esquiver.
Alors, il y aurait au moins
deux manières d’aborder ce mystère d’après la vie.
La première, depuis une
perspective purement humaine et dans les simples limites des connaissances
naturelles, ou alors comme le font les sadducéens de l’Évangile qui croient qu’il
n’y a pas de résurrection des morts, donc tout est joué dans la vie présente,
ici et maintenant.
Mais le psalmiste dirait aux sadducéens :
« vous êtes des Ignorants ». Vous connaissez la Loi et les prophètes,
mais vous ne comprenez pas ce que vous savez.
À l’époque de la vie de Jésus
et pendant la période du Nouveau Testament, les sadducéens sont des
aristocrates. La plupart sont des gens fortunés et qui occupent des fonctions
élevées, y compris celles de prêtre et de sacrificateur. Mais les sadducéens
sont plus concernés par la politique que par la religion. Ils travaillent à
maintenir la paix en s’alignant sur les décisions de Rome. Ils ont des
conceptions religieuses assez décalées par rapport à la croyance orthodoxe en
Israël : pas d’intervention de Dieu dans la vie quotidienne, pas de
résurrection des morts, la disparition de l’âme avec la mort, etc.
Ou bien on peut aussi aborder
ce mystère comme ceux qui mettent les autres à l’épreuve, ceux qui font sentir
leur pouvoir en infligeant des souffrances aux autres, soit pour les
contraindre, les faire renier leur foi, leur liberté de pensée, comme en donne une
idée le récit tiré du livre des martyrs d’Israël.
Nous aimerions que ce genre
de texte appartienne à un passé définitivement révolu. Malheureusement, il nous
faudra encore patienter pour que ce genre de récit ne soit plus remastérisé par
des événements contemporains.
Par leur attitude envers les
autres, ces gens que l’apôtre Paul nomme « les gens pervers et
mauvais », ceux-là prêchent qu’il n’y a pas de résurrection, ou du moins
qu’ils ne la désirent pas pour eux-mêmes. Faire souffrir les autres est l’une
des formes de jouissance dont ils s’enivrent.
L’autre manière d’appréhender
ce sujet c’est depuis la perspective de Dieu, selon la promesse qui nous a été
faite.
Pour l’expliciter, le Christ
reprend une formule récurrente de la profession de foi d’Israël depuis au moins
l’avènement de Moïse, à savoir la formule qui inclut « le Dieu d’Abraham,
d’Isaac et de Jacob », autrement dit, le Dieu de nos pères.
Il ajoute : « il
n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants », autrement dit, l’alliance
faite avec les Pères est vivante, y compris pour ces mêmes pères, bien qu’ils
soient partis.
Autrement dit, la relation
avec Abraham, Isaac et Jacob se poursuivent, et ce lien indéfectible que Dieu
entretient avec tous ceux qui, pour nous, sont partis, ce lien ne passera pas !
Ce lien est ce qui signifie
le plus clairement qu’ils vivront quand l’heure sera venue, car, même morts,
ils demeurent tous dans l’expérience de Dieu. Dieu les connaît chacun
personnellement.
Nous ici, nous pouvons
entretenir un lien affectif avec tel ou tel proche qui est parti. En revanche,
nous sentons que ce lien n’a pas la puissance pour le retenir et encore moins
pour le re-susciter, aussi fort que soit le lien que nous avons avec tel
ou tel. D’ailleurs, il n’est pas dit qu’il voudrait revenir !
Mais Dieu est la vie même, et
le lien qu’il entretient avec chacun a la puissance pour le re-susciter ;
ce lien a la puissance pour le ramener, d’où qu’il se trouve, à condition qu’il
veuille bien re-venir avec lui.
Voilà pourquoi le Christ dit aux sadducéens
qu’ils n’ont vraiment rien compris à ce qu’est Dieu.
Si la relation à Dieu n’avait
pour objet qu’une certaine éthique pour le temps présent, c.-à-d. une manière
de vivre dignement, en se respectant les uns les autres, bien entendu ce serait
toujours mieux que rien du point de vue d’une humanité élevée. Mais, Paul nous
dit que si c’est seulement cela, alors c’est peu et même bien peu par rapport à
l’espérance humaine.
L’humanité vit dans une
tension entre les mystères du commencement et de la fin, ou si vous voulez,
entre les mystères du commencement et du commencement, comme entre deux pôles
magnétiques.
Le christianisme n’élimine
pas ces deux mystères, cela aurait été dommage pour le sel de la vie, mais le
christianisme introduit le mystère de la résurrection, alors que les cultures
parlent de réincarnation et recherchent l’immortalité, mais ces notions n’ont
rien à voir avec la résurrection.
Le christianisme parle de
résurrection des morts, au sens même de résurrection des corps. Cela densifie
encore davantage le mystère au lieu de l’élucider. Il prend exemple d’ailleurs sur la
résurrection du Christ, et c’est d’ailleurs l’exemple par excellence de ce que
l’on doit enseigner.
S’il en est ainsi des corps,
alors, que vous soyez enterré, incinéré, perdu en mer ou en montagne, cela ne
change rien à l’histoire. Il y a le corps fondamental sur lequel le feu ni les
charognards n’ont aucun pouvoir. Nous sommes des êtres délimités dans
l’espace-temps, mais non pas limités par l’espace-temps.
Ceci étant, les disciples du
Christ ne se cassent pas la tête avec ce genre de métaphysique ou ce genre de
théologie.
Ce qui importe c’est cette
relation au Christ, c’est d’habiter cette relation, d’habiter ce lien indéfectible,
de la peser, de la méditer, de la contempler, car elle parle de salut, elle a
le goût du salut.
Elle a le goût de ce que nous
pourrons éprouver lors de ce commencement à venir, c’est pourquoi il faut la
goûter aujourd’hui afin de la reconnaître demain, car la résurrection est déjà
active dans notre vie présente, en tout cas pour ceux qui désirent ressusciter
avec le Christ.
Alors, prions le seigneur
pour tous ceux qui nous ont quittés, prions pour nous-mêmes, afin que nous
sachions vivre de cette relation au Christ ici, afin que nous soyons toujours
avec lui là-bas, car c’est bien ce lien que nous nommons « la vie ».
Amen.
Père Roland Cazalis, image http://static.blog4ever.com/2009/07/335490/big_artfichier_335490_5637680_201604210045808.jpg
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